On a pas fait naitre Léopoldine, on l'a créé.
C'est une punchline qu'un écrivain biographe averti pourrait écrire plusieurs années plus tard, étant tout de même à moitié dans le faux puisqu'au final, on l'a quand même fait naitre et ce paragraphe n'avait fondamentalement aucun intérêt si ce n'est de dire que Léopoldine était sortie d'une chatte.

Et nous laisserons cette ambiguïté un peu gênante en suspens.

Eduquée juste assez pour faire la différence entre ses formes félines et presqu'humaine, elle était si peu souvent aperçue sous ce dernier aspect qu'on finit par se dire qu'elle resterait chat, qu'elle étaient "ratée". Donc, on arrêta de la surveiller, on lui donna du lait quand elle passait par là et basta. Sous forme de chat, on finit par si peu la surveiller qu'elle put aller se promener hors des laboratoire. Et oublier le chemin. S'enfuir ? Elle n'avait jamais vraiment envisagé l'idée, mais elle semblait plaisante. A cette époque, Léopoldine n'était encore qu'un assemblage de son très vague qui dérivait loin bien loin dans les pensées du Chat blanc.

10 ans durant, Le Chat blanc vagabonda dans les forêts, les villes, un peu partout. Dans certains villages du kantô, il nait des légendes sur les chats blancs qui ont probablement un rapport avec elle, d'ailleurs. Si vous aimez le touriste je peux vous... Oui, pardon, je reprends.
Elle vagabonda,donc, jusqu'à ce qu'une nuit, un félin l'aborde. La sensation était nouvelle et étrange. Habituée à la solitude, elle n'avait jamais fréquenté d'autres chats -et surtout pas en période des amours-. L'autre n'était pas désagréable à regarder mais peu gentleman. Et plus, quelque chose en elle se révoltait. Ainsi, lorsqu'il tenta une approche plus cavalière, la chopant par la croupe et lacérant sa cuisse au passage, quelque chose en elle changea, se tordit en spirale, ses organes se réassemblèrent et... Elle redevint Léo... Léopdine... Bref. Et à partir de ce moment, on voulut l'attraper.

Elle se souvient encore de cette période, la plus excitante de sa vie, probablement, et la plus terrifiante. Elle restait exclusivement en ville, ne pensant même pas à s'en échapper, et faisait la course avec le monde, sautant de toits en toits et rivalisant d'adresse avec eux. Non qu'elle ait réellement eu peur, mais la notion de jeu paraissait décuplée dans cet endroit. Ca n'était pas une forêt ou une montagne, non. C'était un endroit dédié à son bonheur ludique. C'était parfait. Tout allait bien, elle était heureuse et ivre d'inconscience féline quand...

Elle finit par être attrapée (évidemment) et placée chez une famille qui voulait des chats-files. Là-bas, on lui réapprit à parler, gentiment mais fermement (ouille), on demanda même à un type de lui enseigner quelques trucs humains.
Avec eux, pendant les deux ans que cela dura, elle vit de tout. Elle fréquenta bon gré-mal gré les soirées huppées où on la regardait un peu étrangement, les enfants de la famille qui lui lançaient des pelotes de laine (et l'attraction qu'elle-même y trouvait la dérangeait un peu) et même un peu l'école. En tant que dame de cantine. Une journée.
Mais au bout d'un moment, son inutilité flagrante la rendant quelque peu indésirable, on la mit dehors.

Elle retourna alors à l'animalerie (seule source certaine et inépuisable de lait dans le coin) où on la revendit aussi sec à une jeune fille hystérique par sa mère un peu moins mais tout de même si hystérique qui lui demanda de maintenir un semblant d'ordre dans cet habitat immonde (sic). Restée jusque-là passive devant tout ce qui lui arrivait en tant qu'humaine, elle se retrouvait lâchée dans une société étrange où tout semblait inconnue et vaguement hostile. Elle a l'impression que quelque chose commence.

Et cette fille qu'elle doit servir, appeler "maitresse" -elle comprend encore mal ce que ce terme implique, d'ailleurs- et qui crie tout le temps vers elle commence à la rendre dubitative...

Qu'est-ce que tout cela cache ?